Irlande du Nord visite de BelfastBelfast, j’en avais très envie ! Quelle ne fut pas ma frustration lorsque dès le premier jour de mon voyage en Irlande du Nord il s’est vite avéré que je n’en verrais pas grand-chose… L’aéroport international est situé à 19 km de la ville, une broutille. De plus, il est petit, et on en sort très rapidement. En atterrissant à 17:00 heure locale, je pensais avoir le temps de faire un petit tour en centre ville, pour avoir un premier aperçu. C’était sans compter sur l’indescriptible labyrinthe que constitue pour une première visite des rues dont le nom n’est pas affiché !

Fun à Belfast

J’ai eu beau scruter mon plan Google map imprimé avant de partir (merci au site web de l’hôtel Tara Lodge qui a su le mettre à disposition de ses clients), j’ai eu beau transgresser les règles de savoir-vivre les plus élémentaires en me garant sur un emplacement réservé aux handicapés pour sauter sur le premier policeman qui croisait là (tellement souriants ces jeunes gens serviables !), et j’ai eu beau partir deux fois vers le Nord alors que je visais le Sud, j’ai bien regretté que cette voiture de location n’ait pas de boussole embarquée : il m’a fallu 80 minutes pour rejoindre mon hôtel situé dans une rue paisible d’un quartier animé !…

Donc, avant d’arriver à l’hôtel vers 19:00, j’ai eu le temps de tourner en rond dans le centre ville et de prendre le pouls de la ville. Mais j’ai aussi compris que tous les commerces ferment leurs portes peu avant 18:00 et que la ville ne s’éveille ensuite qu’après 20:00 lorsque les Irlandais entrent dans les pubs et restaurants. Le temps de m’installer dans la chambre, de chercher la connexion Internet (dans l’autre bâtiment…), et je suis ressortie en courant pour tenter d’en profiter un peu : trop tôt, ou trop tard !

Un dîner et une heure plus tard, je m’apercevais qu’en voyageant seule, et femme de surcroît, il faut prendre le temps de s’asseoir tranquillement pour lier conversation de votre propre chef. Sinon, le contact est plus difficile puisque les Irlandais se déplacent et s’amusent en couple ou en groupe. Fiasco donc pour moi pour ce premier jour. J’avais vu la ville, mais je n’en rapportais qu’une impression générale, et aucune photo !

Le soleil envahissant ma chambre dès le lendemain matin 7:00, j’ai opté pour la fuite vers le Nord en me promettant de revenir si possible. J’avais besoin de soleil pour photographier mes paysages et une longue journée de voiture m’attendait si je voulais boucler ce tour d’Irlande dans les délais qui m’étaient impartis. L’Office de Tourisme m’avait laissée libre de décider de mon périple, c’était à moi de gérer au mieux cette liberté pour en voir le maximum, en profitant du beau temps. J’ai donc mis le cap sur le Nord du pays.

Ce n’est qu’au terme de mon voyage que j’ai décidé qu’il me fallait, coûte que coûte, libérer un peu de temps pour explorer cette ville dont tous les indicateurs sont au vert : après des décennies de conflit (de « troubles » comme on les qualifie ici), catholiques et protestants ont accepté de se tolérer mutuellement, les partis politiques se sont apaisés et le Royaume-Uni et la République d’Irlande œuvrent ensemble pour redonner à Belfast la quiétude qu’elle mérite. Pourtant quiétude n’est sans doute pas le terme approprié pour décrire l’ambiance de cette ville en éveil.

J’ai donc réussi à libérer deux heures sur le dernier jour de mon voyage pour retrouver le cœur de la ville, deux heures qui incluent le temps de circulation et la fermeture des magasins. Il fallait donc faire vite, pour aller à l’essentiel. Dans cette optique, et en jouant le jeu à fond, j’ai garé ma voiture dans un parking du centre ville et me suis retrouvée dans l’un des centres commerciaux animés. Si je me suis retenue d’entrer dans quelques boutiques alléchantes (l’Irlande est le lieu idéal pour trouver des vêtements de pluie qui ne soient pas tristes !), j’ai tout de même craqué sur un cornet de glace, surtout pour faire comme les Irlandais, pour me mettre à l’unisson de cette bonne humeur ambiante sans doute venue des premiers rayons de soleil de la semaine. Et armée de la vanille crémeuse, j’ai écouté quelques minutes un groupe de musiciens des rues à l’angle des deux avenues les plus encombrées de la ville, tout en observant les filles à la peau blanche et aux cheveux noir corbeau (et les plus jeunes apprécient les piercings) ou les hommes à la peau rose et au blond vénitien. Prunelles menthe à l’eau ou jacinthe sauvage, les regards se font curieux mais timides. Je n’ai pas osé insister avec l’appareil photo…

Rues de Belfast en Irlande du Nord

Puis j’ai croisé le sourire engageant d’un vendeur de tickets pour un tour de Belfast en autobus à étage, vous savez ces bus rouges et sans toit. En moins de quelques secondes, j’ai pris ma décision : autant jouer les touristes à fond et voir un maximum en un minimum de temps. Je sais que ce ne sera qu’un survol, mais j’aurai au moins vu le principal pour ensuite revenir un jour à l’essentiel. Est-ce du au sac à dos ou à mon accent frenchy ? Le vendeur me gratifie du tarif étudiant : 10£ pour un tour de cinquante minutes minimum, en fonction de la circulation. Ce n’est pas donné, mais en Irlande tout est un peu cher.

Pour avoir déjà fait ce genre de tour à New York lors de ma première visite dans la « big apple« , je monte immédiatement à l’étage où patientent déjà deux familles avec enfants. Je m’installe sur l’une des banquettes confortables et commence à regretter d’avoir ôté le blouson molletonné de mon sac à dos juste avant de descendre de voiture en pensant qu’en ville je ne souffrirais pas du froid : il fait seulement 10° en centre ville (c’est indiqué sur un panneau lumineux en face de moi) et le blizzard s’engouffre dans les avenues aux façades victoriennes du XIXème siècle, tandis que le soleil joue à cache-cache avec les nuages de plomb. Pour 10£ je vais attraper une crève qui va me clouer au lit pour les semaines à venir !…

Pour patienter je surveille l’activité de la rue et je souris devant le regard attentif des jeunes (et moins jeunes) gens qui s’arrêtent soudain pour observer avec une grande attention une procession d’Austin Mini peintes aux couleurs d’une célèbre marque de bière locale qui fait une opération de promotion en klaxonnant sans fin pour attirer les regards sur les conductrices jeunes et sexy qui se trémoussent au son d’une musique tonitruante (voir photo en tête d’article). Succès assuré ! Il faut convenir que les filles sont extrêmement jolies et qu’elles ont plus le profil d’une boîte de strip-tease que d’étudiantes de dernier cycle. Néanmoins l’ambiance reste amicale, on leur envoie acclamations et grands gestes de la main, auxquelles elles répondent bien gentiment. Evidemment tout Belfast est invité à les retrouver dans une boîte locale qui semble connue des autochtones si j’en crois les commentaires enthousiastes d’un Monsieur assis derrière moi et qui commente pour ses amis du New Jersey.

Quand le bus démarre je me demande si le ciel ne va pas nous tomber sur la tête avant la fin de la promenade et je décide de faire un maximum de photos en un minimum de temps, quitte à ce que les cadrages ne soient pas parfaits. Très vite, cela devient un parti pris autant qu’un défi : comment montrer la ville du haut d’un bus pour touristes ?…

Centre ville de Belfast Irlande du Nord

Une charmante guide s’assied simplement parmi nous, ce qui nous permet de profiter de son sourire et de ses plaisanteries personnalisées sans rien perdre de l’excellente acoustique de ce bus. Contrairement à ce que je pensais, j’entends parfaitement chaque commentaire qu’elle fait sur les bâtiments que nous croisons et les rues que nous traversons. Et nous filons immédiatement vers le quartier du Titanic.

Il faut venir à Belfast pour se souvenir (ou apprendre ?) que le célèbre paquebot fut construit dans les chantiers navals de la belle Irlandaise, pendant trois longues années. Un bateau qui offrit sans le vouloir une belle célébrité à un quartier défavorisé et qui a su, depuis, en tirer parti. Je passe sur les données chiffrées du chantier naval qui ne me passionnent pas (je ne suis pas une femme de chiffres, l’aviez-vous compris ?…) mais je reste pensive devant les dimensions qui s’offrent sous nos yeux sceptiques puis ébahis. Si j’ai eu la chance de voir le France plusieurs fois (privilège de gamine passant une partie de ses vacances au Havre puis hasard d’adulte en vadrouille dans le port de croisière de Miami), la cale qui hébergea le Titanic et la taille des bornes d’ancrage me laissent pensive…

Pour mémoire je rappelle que ce vaisseau d’un luxe absolu quitta le port de Southampton en Angleterre pour son voyage inaugural le 12 avril 1912, pour ne jamais arriver à New York. Il croisa sur sa route un iceberg descendu de Terre-Neuve qui ne laissera que 868 survivants pour 1500 disparus. Pour alléger l’atmosphère notre guide irlandaise raconte l’anecdote d’une Lady qui lui disait quelques jours auparavant « you built her, we sank her » (« vous l’avez construit, nous l’avons coulé« ), en relation avec le fait qu’un Ecossais était aux commandes et que c’est un iceberg canadien qui l’a heurté… Je note par ailleurs qu’en anglais on utilise un pronom féminin pour qualifier les bateaux. Hommage aux dames…

Pour l’heure, le quartier a été réaménagé, et si je le voulais je pourrais profiter d’une visite au musée dédié ou bien entrer dans le cinéma Imax tout proche qui projette les derniers films tout droit sortis des usines hollywoodiennes.

Notre tour de la ville se poursuit par la traversée de différents quartiers et la présentation de divers bâtiments historiques : l’hôtel de ville, la tour du Prince Albert (époux de la reine Victoria), l’Université, l’Opéra, quelques pubs célèbres, des églises et cathédrales,… Mais le point fort de la visite, même si tout le monde à bord aurait sans doute la pudeur de le nier, c’est l’accès au quartier Ouest. Quand les rues aux maisons victoriennes de brique rouge et aux bow-windows fleuris cèdent la place aux façades plus austères teintées de blanc et de gris, la guide évoque pour nous très brièvement les conditions de vie des habitants de Belfast soumis aux « troubles » qui ont agité la ville pendant près de trente ans. Explosions, snippers embusqués, insécurité permanente rendaient les déplacements hasardeux. Ainsi sont nés les célèbres « black taxis », aux chauffeurs audacieux qui ont un jour accepté de prendre à bord plusieurs clients à la fois pour permettre à davantage de personnes de rentrer chez eux le soir, des taxis qui courent toujours la ville dans une ambiance nettement plus détendue.

Et détendus, les Irlandais de Belfast Ouest le sont : chaque fois que notre bus passe ou s’arrête au gré de la circulation devant un pub, nous avons droit à des cris enthousiastes et salutations amicales qui font rire notre guide, à tel point que je finis par me demander si le gouvernement n’a pas institué une diminution d’impôts pour tout citoyen désireux de faire preuve d’un accueil chaleureux aux visiteurs du quartier Ouest !… Je sais que ce serait pousser la bonne volonté dans ses derniers retranchements, mais cela allège nettement l’ambiance qui imbibe les façades éraflées de certaines rues. Dans un recoin on nous désigne quelques pans d’un mur tagué de graffitis, emblème de la séparation des quartiers dans le passé, vague réminiscence d’un autre mur (plus haut) dans une ville germanique. Puis nous passons devant le commissariat le plus petit mais le plus célèbre d’Irlande, protégé par une épaisse ceinture de barbelés.

Mais ce que je retiendrai surtout du quartier Ouest, à part ces acclamations bon enfant des buveurs de bière et amateurs de foot en tee-shirt aux armes de leur club favori, ce sont certainement ces façades peintes par des artistes de rues qui illustrent à leur façon les évènements politiques passés ou actuels. D’où par exemple une amusante allusion à la politique de George W. Bush qui est attendu dans les jours à venir…

Peintures murales de Belfast

Lorsque le bus nous dépose à notre point de départ en centre ville, toutes les boutiques sont déjà fermées et je cours littéralement jusqu’au centre commercial avec la peur qu’ils aient bouclé le parking ! De fait, le parking ferme à 19:00 mais ma voiture est identifiable immédiatement parmi trois autres véhicules isolés sur l’étage du parking qui était tout à l’heure complet ! Dès 18:00 tous les habitants désertent le centre ville, je m’en souviendrai, parce que je reviendrai.

Je reviendrai à Belfast mais accompagnée, parce que la kyrielle de pubs et restaurants que j’ai vus appellent à la chaleur humaine et à la convivialité. Je suis même convaincue que la ville mérite d’être visitée, consommée, pendant une escapade de deux ou trois jours : assez pour faire du shopping et goûter à l’Irish stew et aux bières irlandaises, et pour essayer deux ou trois boîtes branchées qui semblent faire le bonheur des jeunes Européens qui trouvent ici un pendant nordique à l’agitation de Barcelone la turbulente…


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